Un article du Monde nous a alerté. Il semble indiquer une grande menace liée à la découverte récente de la dangerosité du stockage dans les nappes phréatiques d’une nouvelle famille de molécules issues de la chimie [1]]].
L’article est associé à une carte du Guardian [2]pour voir la pollution des des nappes au travers des forages.
Tout d’abord un petit historique. Le Teflon [3]est découvert par hasard par un jeune chimiste en 1930. Son développement fut laborieux jusque dans les années 1960 avec l’invention de la Tefal par un français, le PTFE étant très difficile à transformer. Pourtant l’alliance Carbone/Fluor a des propriétés extraordinaires antiadhésives, de résistance en température, et d’inertie chimique (rien n’adhère dessus).
Ces propriétés ont fait que dans les années 1950, on a cherché à développer des molécules comportant des séquences plus ou moins longues de Carbone Fluor, -(CF2)- avec en bout une fonction acide ou sulfone [4].
Et c’est là que le bât blesse. On compterait plus de 4000 molécules possibles de ce type, principalement regroupées dans les PFAS (Per- et Polyfluoroalkylées de l’anglais per- and polyfluoroalkyl substances). Certaines d’entre elles sont très toxiques... Si la partie chaîne -(CF2)- est hydrophobe, le bout lui est hydrophile. Ces molécules sont donc des tensio-actifs anti adhésifs. Elles seront très utilisées dans les étanchéités, les protections à l’eau, lubrification à sec, anti salissures, imperméabilisation de vêtements…
Or, beaucoup de ces PFAS sont suspectées ou sont des perturbateurs endocriniens. Nous savons qu’avec les perturbateurs endocriniens la notion de dose est complexe. C’est la mise en contact couplée à un moment de modification hormonale (fétus enfance, adolescence, maladie hormonale...) qui serait plus problématique. De même la notion d’effet cocktail, encore mal connue, serait importante.
Une directive européenne transcrite en droit français demande la recherche de 20 PFAS dès 2019 dans l’eau, les sédiments... Un arrêté définit les capacités des laboratoires de mesure [5].
L’arrêté prescrivant les nouvelles limites dans les eaux paraît le 30/12/2022 [6]. La LQ (Limite de Qualité) pour l’eau potable est de 0,1 mg/l pour les 20 principales PFAS. Les limites de quantification imposées pour la quasi totalité des 20 PFAS référencées sont de 0,01 mg/l à la date du décret et 0,002 mg/l à partir du 31/12/2021. Dans l’eau brute destinée à l’EDCH, on impose la LQ de la somme des 20 PFAS à 2 mg/l.
Pour imager toutes ces limites en considérant que les masses volumiques de l’eau et d’une PFAS soient identiques (1KG vaut 1litre). La LQ de 0,1 mg/l correspond à la recherche d’une pollution maximum tolérée générée par l’équivalent d’une pincée de sel de cuisine (0,3 à 0,5g) dans une piscine olympique de 3750 m³ (50m x 25m x 3m). Nous touchons ici du doigt la complexité de ces mesures de pollution.
La base de données ADES du BRGM nous permet de collationner les mesures où les PFAS sont recherchées dans les eaux souterraines et trouvées au moins sous forme de traces [7].
En mesure, pour qu’un résultat soit valable, il faut qu’il se situe dans le domaine de validité du système de mesure. La valeur doit donc être supérieure au seuil de quantification, et inférieure au seuil de saturation du système de mesure. Pour toute mesure inférieure au seuil de quantification, on donne la valeur du seuil de quantification. Cette valeur ne sera qu’indicative, elle indique la présence de traces. Rappel : toute valeur inférieure à 0,1 mg/l représente moins de 0,3g de sel de cuisine dans une piscine olympique.
L’étude du tableur constitué à partir des données ADES montre qu’aucune mesure dépassant le seuil de quantification annoncé n’est supérieure à la LQ. Toutefois, nous constatons quelques anomalies.
Tableau 1 : Anomalies sur les résultats
Ces trois forages -Tableau 1- dans les 3 communes sont les seuls points donnant des dépassements de LQ, mais non recevables car inférieures à la limite de quantification. Dans un texte, il est précisé qu’il existe un risque provisoire d’erreurs car les structures manquent d’étalons. Il faut savoir que tous ces matériels doivent être étalonnés régulièrement. Toutes les mesures de ces puits sont effectuées par le même laboratoire : Référence 22310001700225, le Laboratoire Départemental de l’Eau de la Haute-Garonne. Ce laboratoire rend des mesures non conformes. Les limites de quantification indiquées sont celles des résultats, elles ne correspondent à rien. Pouvons nous espérer qu’il n’ait pas été rémunéré pour ce travail non conforme ?
Tous les autres résultats sont obtenus par un deuxième laboratoire : Référence 41881405900014, l’Établissement Public Laboratoire Départemental des Pyrénées-Atlantiques (64). Le -Tableau 2- extrait les quelques valeurs dans le domaine de validité.
Tableau 2 : Mesures dans le domaine de validité
Nous avons ici des choses qui semblent plus cohérentes. Nous sommes très en dessous des limites de qualité.
Il y a une chose très étonnante sur Mont de Marsan. Deux type de captages d’eau sont évalués. :
- La source de la poste ( BSS002ECYZ) récupération de l’eau en surface
- BSS002ECXW forage à 1850 m de profondeur eau thermique à 60 °C
Le premier cas donne des valeurs à la limite de quantification soit 0,01 mg/l. On pourrait être fondé à reconnaître des traces de pollutions suite à la proximité du captage avec la surface qui est une source. Or le deuxième forage qui a une profondeur de 1850 m extrait une eau chaude à 150 °C qui, pour le moins, date de plusieurs milliers voire de plusieurs centaines de milliers d’années. Or les molécules recherchées n’existaient pas avant les années 1950. Pourtant les valeurs mesurées oscillent entre 0,01 et 0,04 mg/l, soit plus importantes que celle de la surface. Nous pouvons peut être émettre l’hypothèse que cette pollution très légère provient :
- De la chaîne de mesure
- De composants issus de la réalisation ou des constituants du forage.
Ces pollutions par les PFAS, relativement faibles dans les Landes, mériteraient des études plus approfondies pour faire la part des choses avant de crier au loup.