Version 2
Alors que le salon international de l’Agriculture bat son plein à Paris, et que la part de la valeur ajoutée revenant aux agriculteurs de l’€ alimentaire est toujours aussi basse 6,3€ pour 100€ d’alimentation achetée), revenons sur la problématique des pesticides.
L’an dernier, nous avions découvert que dans les Landes une technique très simple avait été trouvée pour que l’eau potable ne soit pas polluée : Il suffisait de ne pas chercher un pesticide pour ne pas le trouver.
Nous avions écrit aux instances responsables pour leur faire part de notre étonnement de cet état de fait, et poser quelques questions. Nous n’avons pas été déçus des réponses, comme vous avez pu le lire dans l’article cité.
Les achats de pesticides pour l’année 2018 sont parus, complétons nos données. Voici la répartition de l’achat des pesticides répartis par code postal. Ces données renseignent sur les achats officiels par code postal (par adresse de l’exploitation agricole). Un agriculteur peut également répandre ses pesticides sur un autre code postal s’il gère des terres sur plusieurs codes postaux.
- Achat de pesticides en tonne dans les Landes par code postal
En 2018, ce sont 636 tonnes de produits phytosanitaires qui ont été achetés par le monde agricole dans les Landes. Parmi ces 636 tonnes 553 sont des pesticides avérés.
Nous avons un écart de 0 à 50 en fonction de la zone géographique du code postal. Les codes postaux les plus chargés en achat sont les zones où le Métham-Sodium est utilisé. L’Anses a annoncé le retrait de l’AMM de cette molécule en novembre 2018, avec une fin d’utilisation au 31/12/2018.
Nous ne connaissons pas la répartition de la SAU (Surface Agricole Utile) de chaque code Postal. Nous allons tenter de visualiser la pression des pesticides en fonction de la surface de la zone de Code Postal de la déclaration d’Achat. Cette information vaut ce qu’elle vaut.
- Achat de pesticides en Kg/Ha de surface du code postal
Nous constatons que la répartition en Kg/Ha de surface de Code Postal va de 0 à plus de 200. Y a t il raisons de s’inquiéter, ou n’est ce que de l’auto-agribashing agricole ?
Plusieurs enquêtes publiques sont faites sur les cours d’eau et bassins versants. Il est regrettable que jamais les porteurs de projets ne fassent la liaison entre les cours d’eau et les achats de pesticides. Voici donc pour les aider cette information visuelle :
- Pesticides et Hydrographie 2018
La représentation est édifiante. On comprend mieux "l’effet drainage" qui fait de l’Adour un fleuve bien chargé en pesticides. Il est à noter que contrairement à d’autres structures, le Bassin Adour Garonne cible plutôt bien les pesticides à rechercher. Ce n’est pas le cas de L’ARS des Landes dans sa recherche de la pollution de l’eau potable.
Regardons l’évolution des produits phytosanitaires et donc des pesticides ; entre 2014 et 2018 nous sommes dans le maintien global des consommations :
Nous remarquons la grande efficacité des deux plans de réduction des pesticides qui annoncent comme objectif la baisse de 50% PNSE 1 (2008-2018), et PNSE 2 (2015-2025). La volonté du gouvernement pourrait s’interpréter au regard des subventions accordées. Que pèsent les 0,2 Mrds d’€ (200 millions) pour l’agriculture biologique face aux 9 Mrds d’€ de la PAC en France ? Le rapport de 1 à 45 montrerait-il la réalité de la volonté des gouvernements successifs ?
L’évolution pour les Landes des 5 principaux pesticides de 2014 à 2018 :
Rappelons que l’Anses a annoncé le retrait de l’AMM du Métham-Sodium en novembre 2018, pour une interdiction d’utilisation le 31/12/2018.
Voici la liste des 20 premiers pesticides achetés dans les Landes en 2018 (88% des pesticides et 77% de l’ensemble des phytosanitaires) :
Seuls les 5 pesticides (fond blanc) sont recherchés dans l’eau potable. Nous avons fait un courrier à la préfecture, et aux diverses instances. Vous avez pu lire dans l’article cité plus haut les réponses, ou plutôt les non-réponses.
La regroupement national des PPP (Produits Phyto Pharmaceutiques) composés essentiellement de pesticides comprend 4 classes :
- N Organique : Substance Organique dangereuse pour l’environnement
- N Minéral : Substance Minérale dangereuse pour l’environnement
- T, T+, CMR : substance toxique, très toxique, cancérogène, mutagène, toxique pour la reproduction
- Autre
Voici la répartition des produits phytosanitaires pour l’année de 2014 à 2018 :
Le groupe ’ Autre ’, sans la moindre explication de classification, nous interpelle. Nous nous sommes demandés si elle ne contenait pas les produits utilisables en agriculture biologique. Or, dans ce regroupement, en plus de produits bio, on trouve quelques molécules intéressantes. Par exemple, dans les achats 2017 et 2018, nous découvrons un produit très curieux, l’Asulame. Pour les codes postaux :
- 40210 : achat de 400 kg en 2017
- 40430 : achat de 188 kg en 2017
- 40990 : achat de 120 kg en 2017
- 40230 : achat de 80 kg en 2017
- 40410 : achat de 80 kg en 2017 et 80 kg en 2018
L’AMM (Autorisation de Mise sur le Marché) de ce produit nommé ’ Asulmane ’ a été retirée le 31/12/2011, son utilisation est interdite depuis le 31/12/2012 [1]. L’AMM indiquée correspond à un herbicide interdit le ’ ASULOX CEREXAGRI S.A.S. ’ [2], utilisant cette molécule active. Par contre le Numéro d’identification CAS : ’2302-17-2 ’ correspond à un produit chimiquement très proche ’ l’Asulman- Sodium ’ non présent dans les bases de données E-Phy Anses. Ce dernier produit ne serait donc pas homologué en France.
Nous avons aussi en bonne quantité le Benoxacor, compagnon indispensable du S-Métolachlore, désherbant bien connu de pré et post levée du maïs.
Rien que sur la période comprise entre août 2019 et février 2020, l’Anses a annoncé le retrait de plusieurs pesticides contenant des substances actives devenues dangereuses après avoir été classées sans danger [3]. Pour les Landes, la composition à base de ‘Chlorothalonil ’ (T, T+CMR) 3 tonnes en 2018 et 19, les produits contenant du ’ Diquat ’ (T, T+CMR) 2 tonnes en 2018, des produit à base de ’ Chlorprophame ’ (T, T+CMR) 1 tonne en 2018, de ’ Propiconazole ’ (N Organique) 1 tonne en 2018.
Étonnant non ?
Intéressons nous à une famille de produits aujourd’hui au centre de l’actualité : la famille des désherbants à base de Glyphosate [4]. Début 2019, il existait 190 AMM pour des pesticides contenant du Glyphosate. Dans les Landes, le monde agricole en a acheté pour 96 tonnes en 2018. Or, l’ANSES annonce régulièrement des retraits de certaines formulations, soit à cause de la molécule elle même, 137 retrait d’AMM courant 2019, soit à cause des adjuvants d’efficacité (126 en 2016 à cause du POE-Tallowamine )...
Le tableau ci-contre nous montre pour le tonnage acheté en 2018 dans les Landes ce qui demeure autorisé en fin 2019.
Nous touchons ici du doigt un problème classique de ces AMM bâties sur des données fournisseurs qui ne sont parfois que très peu durables. Bon pour la santé hier, dangereux aujourd’hui, risque d’altération de la santé et de la bio-diversité demain. c’est le cercle infernal de l’agro-chimie, et parfois de la pharmacie.
En conclusion, le problème des pesticides est toujours aussi préoccupant. L’inertie d’une partie du monde agricole, comme des instances de l’état, mérite peut être un signalement à la cellule DEMETER mise en place par l’état et les agriculteurs [5]. Cette cellule à pour but de lutter contre l’Agribashing dont se disent victimes les agriculteurs. Parmi les causes de l’agribashing, cette cellule traite les vols de tracteurs, d’électronique embarquée, les vols de gazoils, toutes ces choses qui dénaturent l’image du monde agricole. Peut être que la cellule DEMETER pourrait nous indiquer si, à son sens, les faits que nous venons d’analyser ne constituent pas une forme d’auto-agribashing par certaines instances agricoles ou quelques agriculteurs ?
Principaux pesticides par Code Postal
- Achat de S-Métolachlore 2018
- Achat Glyphosate 2018
- Achat Métham-Sodium 2018
- Achat Mancozebe 2018