Nos politiques ont décidé d’effectuer un dragage à but économique du lac marin d’Hossegor. Nous avons publié plusieurs articles sur ce sujet.
Que ce soit clair pour tout le monde, les Amis de la Terre ne sont pas hostiles à un dragage économique du lac d’Hossegor. Toutefois, ils demeureront toujours opposés à un dragage tel qu’il est actuellement prévu.
Dans cet article, nous détaillerons un aspect particulier de cette opération. Il traite de la forte probabilité de pollution des sédiments, et d’une erreur d’appréciation, voir d’une forme de manipulation des données de cette pollution.
Habituellement, ce type de sédiment est rejeté en mer, au large, et de manière à ne pas impacter ni les plages, ni les éventuelles zones d’élevages, ou écologiquement fragiles. Or dans cette opération, dans un but essentiellement de chasse à la subvention, les porteurs du projet veulent déposer ces sédiments sur des plages très fréquentées tout au long de l’année.
Les figures (hormis les tableaux) sont obtenues avec QGIS logiciel libre de géoinformation. L’ensemble des données sont issues des documents fournis lors de la deuxième enquête publique. Nous n’avons rien inventé.
Le Lac
Clic droit su la figure pour l’agrandir
Le lac d’Hossegor, état des lieux
Les carottes d’évaluation, la définition des zones à draguer, la bathymétrie
Douze carottages sont positionnés de manière à qualifier le lac par partie (mailles).
Le projet définit 5 zones à draguer avec des profondeurs constantes dans chaque zone.
Une bathymétrie exploitable a été fournie, nous l’avons retranscrite pour la zone à draguer.
Les analyses
Lors de la première enquête publique, nous avions découvert que les analyses effectuées étaient du type analyse de la masse d’eau ; elles ne prenaient en compte que les premiers millimètres de la couche de sédiments. Elles n’étaient donc pas recevables.
Une deuxième série d’analyse est effectuée en juillet 2016. Elle montre des dépassements des seuils N1 du protocole défini par l’arrêté du 14 juin 2000. Rappelons que cet arrêté fixe des limites non corrélées avec le vivant. Les seuils N1 et N2 étant établis "à dire d’expert", et ne sont que des aides à la décision.
Une deuxième série d’analyse sur les mêmes points a été effectuée début août 2016. Très curieusement, elle ne montre aucun signe de pollution des sédiments. Nous doutons très sérieusement de la qualité de ces résultats d’août. Il en est de même du responsable du bureau d’étude en charge du dossier qui a émis de sérieux doutes sur ces résultats lors d’une réunion publique.
Dans ces remarques à la DDTM du 27/09/2017 L’IFREMER indique : Le sédiment est une matrice qui intègre la contamination accumulée au cours de plusieurs années. Les résultats supérieurs au niveau N1 obtenus en juillet 2016 n’avaient donc aucune raison d’être remis en cause sauf si le laboratoire d’analyses avait signalé une erreur. Il faut donc considérer que la contamination est existante, d’autant que l’Ifremer obtient depuis plusieurs années dans le cadre du suivi DCE, des résultats qui la confirment sur un site de la rive orientale du lac d’Hossegor.
Nous rejetons donc ces mesures d’août 2016, et les essais du protocole H14 qui ont été effectués avec ces échantillons d’août.
Les carottes extraites sont divisées en deux parties :
- La partie supérieure est dans la couche de sédiments dragués.
- La partie inférieure est dans la couche de sédiments restants dans le lac.
Nous avons donc une image des deux parties du sédiment, en un seul échantillonnage.
Toutefois, la lecture des analyses de juillet présentent d’autres curiosités.
Le tableau de l’analyse des sédiments dragués porte les carottages N° :
- 1,2,3,7,8,9,10,11,12. Il manque les échantillons des mailles 4,5,6.
Le tableau de l’analyse des sédiments restants dans le lac porte les carottages :
- 1,2,4,5,6,7,8,9,10,11,12. Il manque les échantillons de la maille 3.
Après plusieurs demandes, les porteurs du projet nous expliquent que ces carottages sont effectués dans des zones où il n’y a pas de sédiment à enlever au dessus de la carotte pour les cas N° 4,5,6. Et, dans le cas N° 3, la couche de sédiment à enlever est trop épaisse pour que le carottage extrait suffisamment de matière en vue de l’analyse des sédiments restants dans le lac.
Non évaluation de la qualité des sédiments
Avec Qgis, nous pouvons porter la position des carottages, sur la bathymétrie, et les zones de dragage.
Détail : superposition de la position des carottages, de la bathymétrie et des profondeurs à draguer.
La figure est sans appel. Les carottes manquantes dans la qualification des sédiments à extraire sont positionnées dans des trous d’eau, et ne permettent pas d’extraire de matière en vue d’analyser les sédiments à draguer. Est ce une erreur, ou est ce volontaire, nous n’ouvrirons pas le débat.
Par contre, nous pouvons pour ces trois mailles vérifier si on extrait du sédiment ou pas :
Mailles 4,5,6, sédiments extraits en fonction des profondeurs de dragage souhaités.
La représentation est sans appel. Les parties draguées sont colorées, les trous correspondent aux parties non draguées. Nous verrons plus loin que l’échantillon de la maille N°6 qualifiant les sédiments restants est un des plus pollué.
Un calcul complémentaire permet d’évaluer à 25% le volume total de sédiment extrait ou dragué non évalué, soit près du tiers la surface de dragage.
Pollution
Lors des deux enquêtes publiques, les porteurs du projet donnent une évaluation de la pollution selon le protocole N1 N2 qui n’est qu’un système d’aide à la décision, non lié aux impacts sur l’environnement. Le protocole OSPAR corrèle l’impact sur la biodiversité maritime et le taux de chaque polluant. L’Ifremer demande à plusieurs reprises au porteur de projet d’exprimer les résultats de juillet 2016 dans le système OSPAR normalisé indiquant :"... ce qui laisse supposer une pollution significative si les résultats étaient normalisés".
Dans les considérations du protocole Ospar, nous trouvons :Les valeurs ERL et EAC sont les seuils en dessous desquels on ne peut s’attendre à aucune influence du sédiment déversé sur la biodiversité marine. Toutefois, il est précisé que la procédure OSPAR fonctionne " sur les atteintes directes à chronique, mais ne permet pas de diagnostiquer les risques à long termes, ou en matière de cancérogenèse, de génotoxicité, et de perturbation endocrinienne, ou d’effet combiné " (cocktail). De même, l’application est dévolue au biotope marin, et non à la santé humaine.
Nous reproduisons ci-dessous les résultats des analyses de juillet 2016, avec la correction demandée par l’Ifremer (sans garantie totale pour l’exactitude).
Analyses selon OSPAR des sédiments dragués.
Analyses selon OSPAR des sédiments restants.
Le lecteur remarquera avec intérêt que l’échantillon N°6 est un des plus pollués de la série. Or, cette maille correspond à une maille draguée, mais non évaluée.
Petit jeu intéressant. Pour les échantillons présents dans les deux couches de sédiments, faisons la différence entre les valeurs OSPAR normalisées du sédiment enlevés, et du sédiment restant.
La couleur jaune indique une valeur supérieure pour le polluant donné dans l’échantillon considéré du sédiment enlevé.
La couleur rouge indique une valeur supérieure pour le polluant donné dans l’échantillon considéré du sédiment restant.
Différentiel de pollution normalisée OSPAR Sédiment enlevé - Sédiment restant
Nous constatons qu’il semblerait que le sédiment enlevé soit plus pollué que le sédiment restant. C’est ce qu’indiquait l’Ifremer dans ses remarques.
Certains de ces polluants sont suspectés d’être des perturbateurs endocriniens.
Nous laissons le lecteur juger de l’intérêt ou non à pratiquer la plage de Capbreton une fois les sédiments du lac d’Hossegor déposés.