En 1999, on est passé tout, tout près d’un accident nucléaire majeur à Braud Saint-Louis.
Alors que la tempête se déchaînait la centrale était coupée du monde : plus aucune route n’était pratiquable et aucun hélicoptère ne pouvait décoller.
Voici quelques extraits d’un article paru dans Sud-Ouest le 5 janvier 2000 :
Très près de l’accident majeur
"La centrale nucléaire du Blayais n’a pas résisté à la tempête de la fin de siècle. Le scénario catastrophe a été évité de justesse. La conception du site est sans doute à revoir.
Les tranches 1 et 2 de la centrale nucléaire du Blayais, à l’arrêt depuis la tempête des 27 et 28 décembre dernier, sont passées très près d’un véritable scénario catastrophe, et elles vont vraisemblablement devoir être déchargées de leur combustible, le temps que d’importantes réparations soient effectuées sur le site.
En effet, l’inondation d’une bonne partie des bâtiments a successivement mis hors d’usage plusieurs installations de sauvegarde, comme le circuit d’injection de sécurité (RIS), qui permet de rétablir le niveau du circuit primaire, et l’EAS (aspersion de l’enceinte), qui permet de faire baisser la température à l’intérieur du bâtiment réacteur en cas d’accident.
Quand ce fut au tour, à 8 h 23, le matin du 28 décembre, de la moitié des pompes du circuit SEC (eau brute de sauvegarde), qui prélève l’eau en Gironde, la situation est devenue très grave.
C’est le SEC qui assure en effet le refroidissement de l’ensemble, par l’intermédiaire d’autres circuits, et la sûreté de la tranche n° 1 ne tenait plus qu’à deux pompes, justifiant le déclenchement d’un plan d’urgence interne."
Que se serait-il passé si le gros de la tempête s’était produit par forte marée ou à marée haute ? que se serait-il passé avec un ou deux mètres d’eau de plus dans la centrale ? Personne ne le sait.
Le 25 avril 2011, les Amis de la Terre participaient à la manifestation devant la centrale de Braud-Saint-Louis (cliquer sur la photo pour l’agrandir)
Comme l’explique Christophe Quintin, responsable de la division nucléaire à la DRIRE (Direction régionale de l’industrie, de la recherche et de l’environnement) de Bordeaux, « si le SEC avait lâché, on se retrouvait dans la configuration de l’exercice fait à Golfech en novembre dernier, où l’on avait simulé la fusion du coeur de la centrale au bout de dix heures ». La fusion du coeur étant l’accident le plus grave qui puisse survenir à une centrale nucléaire et peut conduire à la rupture de l’enceinte de confinement.
Cette possibilité est tellement prise au sérieux que les experts de l’Institut de protection et de sûreté nucléaire (ISPN) calculent actuellement quelle a été la probabilité de s’en approcher le 28 décembre dernier.
La fusion, c’est ce qui se passe dans trois réacteurs de Fukushima. Une fois qu’elle est enclenchée, il est très difficile de la stopper.
Il faudra aussi comprendre, explique Christophe Quintin, pourquoi une centrale nucléaire, dont la plate-forme devait rester hors d’eau à la suite d’une « surcote de marée millénale », a pu voir ses installations vitales submergées par de l’eau qui s’est engouffrée dans les multiples galeries techniques, vingt ans seulement après sa construction.
« On peut se tromper, explique-t-il, il y a un travail de conception à revoir. »
Cette dernière phrase résume toute l’arrogance et la bêtise du nucléaire. Cette arrogance et cette bêtise de croire que l’on maîtrise tout, que l’on prévoit tout. A Tchernobyl, ils se sont trompés, à Fukushima, ils se sont trompés. A Braud Saint-Louis, ils se sont trompés, mais on a eu une sacrée chance ! Et s’ils se trompait encore en nous disant que nos centrales sont les plus sûres du monde ?