Propos Liminaires
Le débat public touche à sa fin. Les amis de la terre sont passés d’une position totalement neutre à une franche opposition. Ce changement de position est le fruit de plusieurs facteurs que nous allons tenter d’analyser.
Au début, nous n’avions pas plus de connaissances sur le sujet que le citoyen lambda. Nous avons commencé par nous documenter sur le problème du gaz en France, son poids dans l’énergie, ses principaux acteurs, toutes ces données qui font une approche socio-économique. Puis, progressivement, au fil d’un temps trop court du débat public, nous avons abordé les points particuliers, sans être persuadés d’être exhaustifs.
Contrairement aux ressentis de certains intervenants, nous ne sommes pas certains que le dossier présenté par EDF soit bâclé. Bien au contraire, nous avons l’impression que ce dossier, indéfendable, a fait l’objet de toute l’attention possible. Les arguments mis en avant sont consciencieusement choisis, sacrifiant en particulier à la mode écologique fortement mise en avant. Les zones d’ombre sont éludées avec grand soin. Nous allons examiner ce dossier au travers de ce que nous y avons trouvé ou aurions aimé y trouver. Ce document est le résumé des autres parutions présentes sur le site des Amis de la Terre, ou sur le site de la CPDP. Notre approche a été pluridisciplinaire, plusieurs auteurs ont travaillé le sujet, permettant plusieurs angles d’attaque. C’est aussi ce qui fait la force et la pertinence du discours de notre association.
- La justification économique
- L’impact écologique
- Les impasses techniques
La justification économique
Elle n’est pas faite : le principal argument avancé par EDF est la nécessité de stocker en cavité saline pour mieux répondre à la demande de CCG (centrale de cogénération au gaz). L’argument est d’autant plus intenable qu’aucune centrale n’est prévue sur la zone des deux régions Aquitaine et Midi Pyrénées. EDF ignorait même l’éventualité de la construction d’une CCG liée à la création des LGV du GPSO de plus en plus hypothétique. Or, si nous voulons une réponse rapide à une demande, les lieux de consommation et de fournitures doivent être proches. 25 % des stockages français sont à quelques kilomètres de Pouillon, et TIGF ne semble pas intéressé par des extensions supplémentaires. Ce projet semble n’avoir d’autre objectif qu’une spéculation sur les prix du gaz. Dans son cahier d’acteur, le CESR ne dit pas autre chose.
L’impact écologique
Le dossier est extrêmement fourni sur ce chapitre, tellement fourni qu’il masque l’essentiel : la qualité du diapir, et son contenu. Sur le contenu, EDF est arc-bouté dans toutes ses réponses sur une unique étude liée à un seul forage. Or, une étude du BRGM, qu’EDF ignorait, indique que ce diapir est potentiellement anisotrope, et hétérogène. Cette étude, constamment décriée par EDF, vient d’être confirmée par une contribution du CSRPN et renforce nos inquiétudes. L’expérience du voyage à Manosque a permis de soulever d’autres incohérences, d’autres sujets d’inquiétudes. EDF pourrait très bien suivre le cycle d’Etzel qui mène vers le stockage du CO2. Il semblerait que l’on commence à en parler à Manosque. La nature des conclusions du commissaire enquêteur, et la manière dont la DUP a été menée là-bas sont très inquiétantes. La réalisation et le devenir du saumoduc laisse également perplexe, tout comme la capacité à réaliser un émissaire en mer. Les expériences de la Salie, de la DRT, ou de Mimizan, ne semblent pas inquiéter EDF.
Les impasses juridiques dans lesquelles s’est enfoncé EDF par ses solutions de pompage et de rejet, dans la construction, et l’implantation du site Seveso 2 dans une zone sismique, contenant un diapir potentiellement dangereux sont significatives d’un passage en force. Nous pourrions y voir un comportement habituel de groupes industriels d’un autre âge où la force fait loi.
Les impasses techniques
Nous touchons ici un sujet aussi vaste que peu traité, et constamment éludé par EDF. C’est ici plus qu’ailleurs affaire de spécialistes. EDF a manqué de chance ou de perspicacité. Avec TIGF et son expérience dans les environs, il était évident que des spécialistes locaux interviendraient. Mais il n’en demeure pas moins qu’un simple ingénieur avec un bagage un peu universel pouvait très facilement trouver les failles dans les données du maître d’ouvrage. Elles sont de taille. Nous sommes à peu près certains qu’EDF n’a retiré de son bref passage à Etzel que très peu de l’expérience qu’elle prétend avoir. Nous sommes persuadés, documents à l’appui, qu’EDF n’a jamais creusé de cavité saline sur ce site, qu’elle n’est au mieux que co-locataire de 4 cavités sur ce site. Par contrat, l’entretien comme la construction des cavités n’est pas de son ressort. Le contrat d’utilisation ne débuterait qu’en 2012. Nous attendons à ce sujet la réponse que ne manquera pas de nous faire le président de la CPDP. EDF a omis de préciser la problématique complexe de la fermeture des cavités, se bornant à répéter qu’il suffisait de remplir de saumure, et de cimenter le puits. Sur la qualité du diapir, et la composition des rejets comme de leur traitement, là aussi, ce fut constamment éludé, dissous dans un verbiage sans intérêt.
Conclusions
Par ses manœuvre dilatoires, ses omissions, EDF a perverti un débat public qui a été en contradiction avec ses objectifs d’une information honnête du public. Nous ne comprendrions pas que la CPDP n’en tienne pas compte dans son rendu de conclusion.
Ce projet est incompatible avec l’émergence d’une nouvelle organisation de la société humaine, il est basé sur des préoccupations d’un autre temps. Il ne doit en aucun cas voir le jour.